3 clés pour stimuler l’engagement dans une communauté apprenante

par | 3 octobre 2023 | Ma catégorie

La communauté apprenante est l’innovation pédagogique majeure de la décennie qui vient de s’écouler. Faire une communauté apprenante est assez simple puisqu’il existe un lien de subordination des collaborateurs et qu’il suffit de les mettre en commun pour avoir une communauté. Cela, est-il suffisant ? Assurément, non, il faut autre chose, pour donner une âme à cette communauté. C’est pour cela que le concept d’engagement a pris une telle importance, comment faire en sorte que la communauté prenne ? Comment faire pour que l’apprenant devienne un apprenant engagé ? Quels sont les tips and tricks de l’engagement ?

1, Faire de la communauté apprenante un événement

Avec la montée en puissance de l’infobésité, trop d’information et une urgence dans son traitement, l’apprenant est saturé. Hyper-connexion, 31 % des salariés envoient plus de 50 soirs des emails après 20 heures. Hyper-réactif, 52 % des emails ont une réponse en moins d’1 heure. Rajouter une communauté et demander l’engagement est peu entendable. Il est nécessaire dans un premier temps d’expliquer et de convaincre de l’intérêt de ce nouvel outil. « En quoi ce nouvel outil pédagogique est un plus pour les apprenants ? », et, formuler la réponse dans un mode de punch line pour être entendu dans un monde saturé. C’est par exemple, la technique du pitch. Avoir une stratégie auprès des early adopters de l’entreprise, ces personnes stimuler par l’innovation, pour en faire un verbatim et une validation sociale pour les autres. Donner envie à ceux qui ne sont pas encore entré.

Une fois, dedans, il est nécessaire d’être à la hauteur de la promesse produit. Faire de l’extraordinaire, c’est « l’effet whaou ». Il s’agit d’analyser l’ordinaire et sortir de nos routines formatives. La notion d’extraordinaire dépend de l’histoire de chaque entreprise. Par exemple, pour ceux qui n’ont jamais testé la réalité virtuelle, les faire pratiquer une formation avec un casque Meta Quest Pro (ex-casque Oculus) est souvent extraordinaire et le bouche-à-oreille, ainsi que la politique de tease, feront le reste. Le produit de formation reste le meilleur argument d’engagement. Il ne s’agit pas tant de faire des investissements budgétaires importants que de construire des pédagogies impactantes auprès des apprenants. Par exemple, faire venir un manager de direction permet de faire son petit effet, ou ce peut être, faire venir un pair d’une autre entreprise, d’un autre pays. Tout est possible pour favoriser l’émulation.

Le médiocre, étymologiquement le moyen, ne favorise pas l’engagement. C’est ce que l’on appelle la Learner eXperience (LX), rajouter de l’émotion pour favoriser la motivation et l’engagement. Emotion et motivation ont une racine commune qui se traduit par le mouvement. Comment savoir si l’impact d’une idée est performant ? Il suffit d’interroger les apprenants en amont et/ou en aval. L’apprenant est engagé à donner son avis dans la pédagogie, c’est une reconnaissance sociale qui favorise leur engagement. Remettre l’apprenant au centre de la formation prend une autre réalité. Une politique de guests, personnalités professionnelles, peut très bien être porté par les apprenants eux-mêmes qui peuvent choisir, voir inviter la personnalité choisie. C’est un marqueur de confiance.

2, Construire une pédagogie de l’engagement

La pédagogie, c’est le chemin qui permet d’atteindre les objectifs préalablement définis. Tous les chemins sont bons à condition d’atteindre l’objectif. La pédagogie dépend de la sociologie du moment. Le 20ième siècle est marqué par la verticalité de la pédagogie, le 21ième siècle semble marqué par l’horizontalité, et cette horizontalité trouve son expression avec la notion d’engagement. Qu’est-ce que cela veut dire ? Tout d’abord qu’il y a un changement de paradigme, c’est la montée en puissance de la pairagogie, la pédagogie de pair à pair. La foule devient intelligente, Howard Rheingold écrit son ouvrage en 2005, sortant la foule de son infantilisation, la foule devient adulte, reste à construire le chemin pour apprendre en adulte.

La première étape de la pédagogie de l’engagement est de donner la parole aux apprenants et écouter cette parole. L’intelligence pour être sociale a besoin d’être exprimée. C’est tout le courant de l’intelligence collective qui propose des pédagogies comme celle de l’entreprise apprenante, et ses fameuses boucles récursives (Peter Senge, 1990), écouter l’écoute ensemble. Reste à définir la qualité de l’écoute ? Si dans un premier temps l’écoute était rationalisante rapidement, on s’est aperçu qu’elle devait être aussi inspirante. La pédagogie du P2P s’est enrichie d’une composante affective qui correspond bien à la sociologie du moment.

La seconde évolution de la pédagogie de l’engagement est de faire de l’apprenant un créateur de contenu, Ivan Illich disait que l’apprenant devenait « auteur » de sa formation, c’est un autre chemin. C’est le Learner Generated Content (LGC), c’est l’apprenant qui dans un premier temps source la taxonomie collective, avec que ce l’on appelle le Learner Generated Sourcing (LGS), autour d’une problématique définie verticalement, mais c’est aussi leur redonner la main sur la définition de la problématique, ce que certains appelle le Learner Generated Design (LGD), le design étant perçu dans son double sens dessin, dessiner la pédagogie, mais aussi dessein donner du sens. Cette autonomisation des pairs est une courbe d’apprentissage qui prend du temps, construire un engagement de plus en plus autonome avec les métrics qui assurent le pilotage.

3, Les vanity metrics de l’engagement

L’engagement repose sur l’écoute et l’écoute repose sur une organisation. Comment structurer cette écoute ? Toutes les stratégies sont bonnes à condition d’en avoir une. Les techniques sont connues grâce au savoir-faire marketing, qui travaille depuis longtemps sur l’écoute des clients. Demander à des apprenants autour d’enquête quali leur avis sur le déroulé de la formation permet d’avoir des informations ouvertes particulièrement utile pour améliorer très précisément les points noirs de la pédagogie. Les indicateurs quanti permettent d’obtenir des outils de pilotage plus représentatifs avec par exemple le nombre de likes, de commentaires, … qui permettent de construire un taux d’engagement de la part des apprenants.

La vraie question est de choisir en sachant qu’il s’agit d’une courbe d’apprentissage à l’engagement particulièrement dans une société de défiance, pourquoi prendre le risque de se dire ? Il est nécessaire de protéger la parole et de construire la confiance. Comment faire ? La meilleure façon est de dire ce que l’on va faire et de faire ce que l’on a dit. Autrement dit, que l’institution s’engage pour ouvrir à l’engagement. « Quelle est la promesse de la formation pour les apprenants ? ». Construire des indicateurs de qualité. Faute d’indicateur explicite comme « 30 % de temps gagné », construire des indicateurs de satisfaction des apprenants. « 80 % des apprenants satisfait et 20 % restant ont été contacté pour leur proposer une alternative », donc « 100 % pris en compte ». Et surtout, quelle promesse pour demain ? Mettre en place un politique d’excellence quelle que soit la définition de l’excellence.

Les indicateurs permettent le pilotage, encore faut-il choisir une destination, un challenge d’amélioration des connaissances et/ou des compétences pour donner envie d’apprendre, érotiser les formations. Le choix de l’envie est le fait de l’entreprise, mais la réalité de l’envie est le fait de l’apprenant. Tout le travail de formation est de mettre en société l’engagement, créer des communions apprenantes, partir de l’apprenant autour de sujets qui font sens pour eux. Le mot sens à deux définitions : la finalité, définition traditionnelle en formation, mais aussi la résonance, construire une écoute de cette résonance (Hartmut Rosa, Pédagogie de la résonance, 2022), et l’on retrouve les pédagogues sensualistes.

L’animation est enfin la dernière clé. Faire un commun n’est pas une communauté. Animer signifie étymologiquement allumer un feu, donner de la vie. Le travail de l’animation est essentiel pour construire la contagion émotionnelle avec les deux composantes du métier être inspirant (formateur leader) et être facilitateur (formateur coach). Construire l’engagement des apprenants suppose de professionnaliser les formateurs aux nouvelles formes de formation. Construire la transition de ces nouvelles compétences, tout à la fois l’identité du formateur, son rôle social pour lui donner la fierté du métier, et sa technicité pour animer les nouveaux formats avec un regard particulier sur le numérique. Construire l’engagement du formateur, comme pour les apprenants. Construire l’engagement des autres commence par construire son propre engagement… le mimétisme fera le reste.

Fait à Paris, le 03 octobre 2023

@StephaneDIEB, pour vos commentaires sur X (ex-Twitter)

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