Comment construire son professional branding ?

par | 19 décembre 2023 | Marketing

La notion de personal branding, ou marketing personnel, est née d’un livre d’Al Ries et Jack Trout en 1981 (« Positioning, the battle for your mind »), reprenant l’idée ancienne de construction de sa propre image sociale qui existait dès l’Antiquité. Alors qu’est-ce qu’il y a eu de nouveau dans la marque personnelle ? C’est l’émergence des réseaux sociaux de masse au 21ième siècle qui ont permis la démocratisation du concept et l’application dans le domaine du professionnel, permettre à chacun de se construire une image de marque professionnelle, professional branding. Comment chaque collaborateur, doit-il faire pour se doter d’une image de marque employable ? Quelles sont les étapes dans la construction d’une marque réussie ?

1, Définir le contenu de sa marque

Pas plus que la carte n’est le territoire, la marque personnelle n’est pas la personne, ni même l’individu. L’homme est bien plus que sa marque. C’est que l’on a pu voir avec la controverse Guy Debord Jean Baudrillard (https://affen.fr/uncategorized/responsable-de-formation-lerotisation-du-metier/). Le fait de construire une marque est une façon de choisir une identité professionnelle qui tienne compte de son histoire, de son présent et/ou de son avenir. De quel métier voulons-nous parler ? Et comment voulons-nous en parler ? C’est le choix de la ligne éditoriale de la marque. Un bel exercice préparatoire est de créer une base ligne à notre marque, un slogan, pour ma part, j’ai choisi « agitateur d’idées, créateur de réalités ». Cela permet d’être focus, focaliser sur ce que l’on considère comme une identité professionnelle. Tout est bon, qu’est-ce qui vous ressemble ?

Avoir une marque n’a de sens que si elle vit. Combien et comment voulez-vous produire pour la faire vivre ? La première question est souvent déterminante : si vous voulez produire une idée simple par jour, par exemple une citation inspirante par jour ouvrable, c’est 305 citations à trouver pour couvrir l’ensemble de l’année, mais si l’on veut écrire une chronique de 300, 500 ou 1000 mots, suivant votre rapidité d’écriture, ce n’est plus la même histoire. Le temps disponible pour faire vivre sa marque est un angle opératoire. Si le temps à consacrer est faible, le producteur de marque peut simplement commenter la veille des autres producteurs de contenus. C’est simple, mais pas neutre. Chacun apporte sa couleur dans le choix de son content. Quant au comment produire, pose la question du support texte, audio, podcast, vidéo… Quel est le support que vous préférez ? Lequel est le moins chronophage ? Il faut donc choisir, même si aujourd’hui l’IA générative devient un atout majeur pour produire un écosystème particulièrement avec la multimodalité.

La multimodalité pose la question de la cohérence de l’image de marque, contenue de la diversité des supports. Marshall McLuhan l’a dit en 1964 : « Le message, c’est le médium ». Chaque média a ses propres codes de fonctionnement. Tiktok n’est pas YouTube même si les deux proposent des vidéos. Instagram est beaucoup plus visuel que LinkedIn, cela nécessite d’avoir non seulement une ligne iconographique différente, mais surtout des lignes complémentaires pour que le passage d’un support à l’autre ne fasse pas de rupture pour la cohérence de la marque. Le nombre des supports est énorme, il faut donc choisir une cohérence des supports pour fidéliser les followers. Un post natif sur LinkedIn peut être relayé sur X pour avoir un engagement plus fort. Choisir de tout miser sur un seul média est intéressant, mais le jour où il y a un problème sur ce média, la marque disparaît. Et cela peut arriver…

2, Construire son positionnement professionnel

Le professional branding est souvent considérer comme un média du 20ième siècle, un média vertical qui produit du contenu vers la toile. C’est la stratégie du « qui m’aime me suive ». Cette stratégie est cohérente en situation de faible quantité de média. Or aujourd’hui tout le monde professionnel produit. Même s’il existe des technopathes, sur les 30 millions de population active, il existe des millions de marques. Créer sa marque professionnelle nécessite de savoir ce que la profession veut, autrement dit, ce que le marché professionnel demande comme standard, mais aussi comme élément créateur de valeur rare. Un responsable de formation qui parlerait de data est rare et pourrait se positionner learner data scientist.

C’est là la notion de positionnement. Se positionner, au sens marketing, c’est choisir. Autrement dit renoncer à ce qui n’a pas été choisi. C’est le plus dur. Chacun préfère être généraliste pour couvrir l’ensemble du domaine des possibles. Etre partout, c’est être nulle part. Il faut choisir. Comment ? Par conviction ou par écoute. La première solution est celle du militantisme. Quelle est l’histoire personnelle que vous voulez porter socialement ? Steve Jobs avait cette interrogation « En quoi voulez-vous changer le monde ? », sans être aussi créatif « en quoi voulez-vous changer votre monde professionnel ? »… et votre storytelling professionnel commence à se construire. Sinon, il suffit d’écouter et d’analyser votre marché de réfléchir au monde de demain, de construire ce qui est faiblement représenté et de prendre position, d’en faire l’axe de votre ligne éditoriale.

Parler d’un métier ou d’une profession, est un phénomène social, traditionnellement réservé aux experts, souvent ceux qui ont socialement fait le métier. La nouveauté est que les professionnels aiment sortir des experts, ceux qui « parlent d’en haut » pour échanger entre pairs, horizontalisation des métiers, pour connaître les pratiques de chacun. Ce qui a été théorisé par Eli Pariser comme des « bulles de filtres » (2010) pour dénigrer ce phénomène, peut être aussi vu comme une recherche d’identité professionnelle. Rechercher des praticiens métier, organiser la discussion et faire identité professionnelle. Et même un petit groupe peut grâce aux algorithmes, peut trouver son public organiquement. Faire vivre la marque.

3, Animer sa marque professionnelle

L’animation de sa marque se fait traditionnellement une politique de push et une politique de pull, pousser du contenu et tirer de l’information de la part de ses participants avec des politiques de sondage, de quizz,… ou de l’engagement. La clé du succès est pourtant ailleurs, c’est la régularité de la production qui fidélise. Ainsi, vouloir produire un podcast sur un sujet métier ne dure en moyenne que 10 à 20 épisodes, mais, si comme FORMA Radio, vous dépassez les 300 épisodes vous êtes entrée dans les habitudes des auditeurs, vous devenez un référentiel dans votre positionnement. La régularité est un respect pour les auditeurs. La marque doit se réinventer comme les métiers se réinventent dans le respect de son histoire. Ce qui oblige à être toujours à la recherche de signaux faibles, et donc rester proche des réalités terrain. Construire une marque qui vit dans le temps.

Pour être sûr de son lien avec la cible, il suffit de favoriser l’engagement, ce qui est le credo des réseaux sociaux avec le calcul des différents taux d’engagement. Une communauté avec 20 membres qui produisent chacun une information sur un sujet donné, c’est énorme et une belle source de veille pour la marque. Un groupe LinkedIn peut servir de support à tel programme. L’idéal est de demander à chacun de porter un contenu. Profiter de votre émission vidéo Twicht ou votre Spaces en audio pour interroger vos membres, leur demander un témoignage ou un débat pour confronter les idées… tout est bon, il vous suffit de faire publicité de votre événement en amont et en aval avec des verbatims. Et si la régularité est là, votre social scoring devrait faire le bouche-à-oreilles numérique. Votre marque crée de la valeur pour votre communauté.

Enfin dernier tip, l’animation de sa marque nécessite de sortir de son seul média. Allez commenter les autres médias, donner vos avis, likez… Les créateurs de marque souffrent souvent du syndrome de l’imposteur, ce qui semble encore plus vrai encore pour les femmes si l’on en croit Pauline Rose Clance et Suzanne Imes, créatrice du dit syndrome en 1978. Il s’agit plus de valoriser le travail des autres que de vendre sa propre marque… et pourtant, en les remerciant, les autres s’intéressent à notre production et de belles relations professionnelles peuvent naître. C’est ce que le sociologue Mark Granovetter appelait « La force des liens faibles » (1973). Les liens faibles sont beaucoup plus efficaces pour trouver un travail que les liens forts. Entretenir la qualité de ses relations est au cœur de la marque. En BtoB, 1 000 personnes font de vous un nano-influenceur de qualité.

L’entreprise a intérêt à former ses collaborateurs à construire leur propre professional branding. Tout d’abord pour leur apprendre à se construire leur propre employabilité, de rester connectée aux réalités du marché. L’enjeu est sociétal faire de chacun le créateur de sa propre valeur. C’est important dans l’horizontalisation des structures. Mais aussi pour assurer le rayonnement si difficile du fameux corporate branding. Et enfin, pour accompagner les collaborateurs à la transformation numérique. Par exemple, la création de contenu gratuit multimodale avec ChatGPT devient un atout pour la productivité métier au sein même de l’entreprise. De nouveaux usages émergent, l’entreprise peut devenir le lieu de la coordination de cette dynamique… une nouvelle raison d’être.

Fait à Paris, le 19 décembre 2023

@StephaneDIEB pour vos commentaires sur X (ex-Twitter)

Découvrez « 100 expériences scientifiques de la formation »

Achetez le nouveau livre indispensable pour profiter de la synthèse des fondements scientifiques des pratiques de la formation.