Les 5 compétences de base de l’animateur de communauté apprenante

par | 7 mars 2023 | Organisation

Avec l’émergence des communautés apprenantes dans le mixte pédagogique, le métier d’animateur s’est enrichi d’une nouvelle composante, l’animateur de communautés que ce soit des petits groupes ou des groupes plus importants dépassant les 100 000 personnes. Celui qui anime, c’est-à-dire étymologiquement, celui qui donne de la vie, de la saveur au savoir, pour conduire l’apprenant à atteindre ses objectifs pédagogiques. Le numérique, peut-il développer des communions apprenantes ? Quelles compétences faut-il pour être un bon animateur de communautés apprenantes ? Quelles activités les formateurs doivent-ils maîtriser pour animer efficacement des groupes apprenants ? Quelles sont les 5 compétences de base de l’animateur de communautés ?

1, Être capable de construire une promesse produit

La promesse apprenante est une composante du learnal branding, la politique de marque de la formation. Elle doit être tournée vers l’apprenant pour lui proposer une raison d’être qui lui soit utile dans son quotidien. Qu’est-ce qu’il y a de commun à cette communauté ? Et, une fois, l’identité posée, à quoi sert cette communauté pour l’apprenant ? Autrement dit quel est le pitch de la communauté ? S’agit-il d’un service après-vente, SAV de la formation pour assurer la mise en œuvre des compétences acquises ? D’une hot-line métier pour apprendre tout au long de la vie professionnelle ? Tout est bon. Quel est le message qui propose de porter le service formation ?

Cette promesse peut être descendante et/ou montante, top-down ou bottom-up. Les apprenants peuvent être acteurs de leur propre formation, en définissant eux-mêmes leurs objectifs. Par exemple, une communauté de formateur peut avoir pour ambition de réinventer la formation dans l’entreprise. Cette promesse doit être verbalisée pour permettre un engagement pour tous et une transparence quant aux progrès de l’évolution de cette promesse. Dans notre exemple, on pourrait proposer « qu’est-ce que la communauté a inventé en 1 an ? » et de montrer que la promesse initiale a été respectée. Cette transparence est au cœur de la fidélisation de ses membres.

2, Être capable d’élaborer une ligne iconographique

La ligne iconographique est la liste des éléments visuels comme les photos, les sketch-notes, les pictogrammes, les vidéos, mais aussi le ton de ces éléments s’il s’agit de gamifier la formation, les couleurs peuvent être funs selon une charte cohérente ; s’il s’agit d’humaniser la formation, les photos pourraient représenter des personnes et non pas des objets. La ligne iconographique doit aussi tenir compte du type de support choisi, choisir des images pour accroître la mémorisation nécessite aussi de choisir leur support : choisir des reels, des caroussels, de bandes dessinées, … ne présente pas la même histoire. Le choix iconographique réinterroge la scénarisation. Le choix d’une vidéo ne préjuge en rien de la grammaire choisi, une vidéo YouTube n’est pas une vidéo Twitch ou une vidéo Tiktok.

La routine iconographique est une ergonomie pour l’apprenant pour faciliter son ancrage mémoriel. Une fois identifier les codes de la communauté, l’apprenant ne s’interroge plus sur la forme, mais sur le fond. L’appartenance à une communauté passe par l’acceptation de sa grammaire iconographique. Mais une grammaire ne fait pas l’histoire, il reste le travail pédagogique, mais une histoire sans grammaire ne permet pas la transmission. Il s’agit d’adapter les codes iconographiques au support choisi, et à la cible préalablement identifiée. Communiquer à des générations Alpha ne présente pas la même grammaire que pour des boomers ou des générations silencieuses.

3, Être capable d’élaborer une ligne pédagogique

La ligne pédagogique est l’ordonnancement des grains de formation avec une gestion de capacité attentionnelle de l’apprenant pour organiser les ancrages mémoriels, avec la fameuse courbe d’Ebbinghaus, la courbe de l’oubli. Il s’agit de construire des temps forts et des temps faibles. Le temps fort est celui met en valeur la formation. Le synchrone est le moment privilégié du temps fort, car il permet de faire un temps avénementiel, teaser le moment, donner de la valeur à ce moment. Cela peut prendre par exemple la forme de faire venir une guest, un pair ou un expert, pour réaliser une classe virtuelle, ou un moment de réalité immersive ou encore la réalisation commune d’un podcast apprenant. Faire événement.

Mais aussi faire routine, comme temps faible pour digérer l’événement : assurer les répétitions pour l’ancrage ou la conscientisation des apprentissages. Cela peut prendre la forme d’un rendez-vous régulier comme par exemple « le chiffre du mardi », « la citation de la semaine », « la question du jeudi ». Autrement dit, l’animateur de communauté doit choisir le nombre et la nature des contacts avec l’ensemble de la communauté. Grâce à l’intelligence artificielle l’animateur devient un serial producteur de contenu mixant les supports en grande quantité. Reste à définir des contenus intéressants pour l’apprenant, c’est tout l’enjeu du snack content, et de veiller au burn-out attentionnel.

4, Être capable de susciter l’engagement

La communauté apprenante privilégie l’engagement, c’est une condition nécessaire mais non suffisante. On peut souligner que dans les grandes communautés le nombre d’actifs représente 15 à 20 %, les autres apprennent en regardant les actifs interagir. Cet indicateur fait la part belle, mais il oublie les 80 % qui apprennent différemment. L’engagement va du simple like à des questions asynchrones voire des témoignages. Le travail de pédagogie consiste à structurer les pratiques de l’engagement et d’identifier les points de blocage. L’intelligence collective nous offre des outils pour faire participer le plus grand nombre. Il est possible par exemple d’organiser un World cafe qui mobilise par ses petits groupes davantage d’apprenant.

La pédagogie construit des communions apprenantes, des moments où le plaisir d’apprendre ensemble fait l’apprentissage. Cette communion est l’apprendre seul ensemble, garder l’autonomie mais faciliter les apprentissages par le fait de ne pas porter seul le poids de l’apprendre. Dans ce cadre, le Lerner Generated Content (LGC) est souvent plébiscité. Les apprenants veulent parler de leur situation propre. La pédagogie doit organiser ces moments pour permettre à chacun d’apprendre, la pairagogie, l’apprentissage de pair à pair. Si l’on sollicite des experts, c’est l’interaction qui est privilégiée. Certains parlent parfois de Tiktokisation de la formation avec l’émergence des challenges dans le processus apprenant. Partir de l’apprenant est une demande sociologique et cela nécessite un animateur agile pour partir de l’inconnu et l’orienter le process vers le fait attendre les objectifs pédagogiques préalablement définis.

5, Être capable de construire des KPI

Sans revenir sur la littérature des indicateurs de la formation avec le fameux ROI (Return On Investment), les communautés apprenantes ont leurs propres indicateurs. Même s’ils sont artisanaux, il est important de pouvoir quantifier l’activité d’une communauté, au moins pour savoir comment la faire évoluer. L’indicateur privilégié est le taux d’engagement avec une courbe d’apprentissage, du like jusqu’au LGC, plus les apprenants s’engagent dans leur formation plus cela signifie que la formation les faits réagir. Une courbe d’apprentissage signifie une progression dans la finesse de l’indicateur. Si l’on favorise les FAQ comme engagement, le KPI peut être d’abord le nombre mais avec le temps il faut affiner et proposer par exemple le nombre de réponses proposés dans les 24 heures qui suivent la question. « 95 % des questions ont obtenu une réponse dans les 24 heures ». L’indicateur suit la maturité du process.

Le LSAT (Learner Satisfaction) reste l’indicateur de base. Et là encore il y a une courbe d’apprentissage pour que les apprenants affiner leur posture, jusqu’à faire des propositions d’amélioration. Rendre l’apprenant auteur de sa formation. Le numérique pourrait apporter un complément de KPI avec par exemple l’analyse du wording. Les mots et les idées permettent d’identifier la transmission effective individuelle et collective. Cela permet d’ailleurs d’identifier des besoins non exprimés et de proposer une suite à la relation apprenante, voie même une prédictibilité. Les indicateurs nourrissent la promesse de la formation et permettent aux apprenants aussi bien qu’aux managers d’avoir des outils d’information.

Animateur de communauté n’est pas un métier faute d’avoir une identité professionnelle suffisante. Il s’agit davantage d’une activité qui donne une valeur ajoutée à des métiers comme formateur ou pédagogue. Le travail d’organisation consiste à socialiser cette activité, aujourd’hui beaucoup préfère externaliser ces compétences et demain il faudra les internaliser pour faire évoluer les métiers existants. Les retours d’expérience montrent que l’animateur de communauté pure player a du sens et fonctionne bien. Mais l’impact est plus fort lorsque l’entreprise associe présentiel et distanciel. La force du présentielle est d’accroitre encore davantage la contagion émotionnelle et le lien au sein du groupe. C’est un atout majeur pour favoriser la vie dans la communauté. Et de faire de chaque apprenant un animateur pour les autres. Alors #TousAnimateurs ?

Fait à Paris, le 07 mars 2023

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