L’éthique en formation, un fondement à renouveler ?

par | 1 juillet 2025 | Philosophie, Responsable de formation

Pourquoi s’interroge-t-on aujourd’hui tant sur l’éthique ?

Le monde change, et en période de changement le mode interrogatif est de mise. Le philosophe Gaston Berger, disait « Le monde change, l’homme continue » (L’homme moderne et son éducation, 1962).

Tout devient impermanence.

Certains parlent d’un moment rabelaisien, un changement culturel de nos définitions, de nos organisations, une Renaissance postmoderne, une nouvelle radicalité qui s’écrit en la faisant.

Les penseurs de la formation ont le rôle d’apporter cette couleur nouvelle, une perspective différente pour éclairer la formation. Jorge Luis Borges avait cette belle formule : « Un grand poète est moins un inventeur qu’un éclaireur » (La quête d’Averroès, 1947).

Un expert de la formation doit devenir un éclaireur, celui qui part en avant-garde pour ouvrir le chemin.

Il s’agit de sortir des paradigmes dominants pour, soit les faire évoluer, soit imposer une nouvelle voie. Marcel Gauchet résumait le 20ième siècle par l’opposition fructueuse entre transmettre et apprendre (Transmettre, apprendre 2014).

Le 21ième siècle, reprendra-t-il cette controverse entre ceux qui mettent l’éclairage sur la capitalisation des savoirs, le savoir des Anciens, et ceux qui mettent l’éclairage sur l’autonomie des apprentissages, voir l’émancipation de l’apprendre, ou choisira-t-il une nouvelle idéologie ?

L’éthique, c’est sortir des habitudes pour tenter l’aventure de penser autrement au-delà du quotidien.

Un moment éthique est un moment où il est possible de sortir du paradigme dominant (Thomas Khun, 1962), sortir de ce qui est accepté par tous les professionnels de la profession, ceux qui font autorité, sortir de la morale de la formation.

Si morale et éthique ne sont à l’origine qu’une distinction linguistique, latine et grecque, la littérature a retenu que morale vient de mos, mœurs, les bonnes mœurs, les normes sociales et qu’éthique vient de éthos, manière d’être, les usages. La morale serait un fait social qui énonce des règles de bon fonctionnement alors que l’éthique serait plus un dépassement de la norme pour interroger le sens de la pratique, la finalité de la formation.

Deux façons de regarder la même chose.

Sortir de l’Empire du bien comme disait Philippe Murray (1991), cette facilité de gouvernance qui impose le paradigme dominant comme une vérité sociale.

Aujourd’hui de nouvelles pédagogies s’expriment comme la pédagogie narrative, la pédagogie de la résonnance (Hartmut Rosa, 2022), la pédagogie de vulnérabilité (Brené Brown), la slow pedagogy (Maurice Bolt), la pédagogie de la pleine conscience, et tant d’autres.

Le moment est créatif : « Que cent fleurs s’épanouissent, que cent écoles rivalisent » (Mao Tse Dong, 1957). C’est une proposition de liberté sociale, ouvrir les mots de la formation pour en faire des fenêtres.

L’éthique est une ouverture sur la formation qui est rationalisante mais aussi émotionnelle, relationnelle, voire spirituelle.

Les pédagogues sensualistes se réinvitent dans le débat.

« Tout est bon » disait Paul Feyerabend (Contre la méthode, 1975) pour peu que l’échange soit possible.

Reste à construire une façon de penser autour des questions qui restent les mêmes : Quelle place donne-t-on à l’homme face au savoir ? Quoi apprendre ? Comment apprendre ? Apprendre pour faire quoi ?

L’éthique de la formation, c’est un destin commun que nous dessinons ensemble.

Fait à Paris, le 01 juillet 2025

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